
26/11/2020 par LC Expert immobilier - Expert en évaluations immobilières 0 Commentaires
L'abus de majorité en copropriété
L’article 22 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 prévoit dans son deuxième alinéa, de limiter les tantièmes du majoritaire à ceux des minoritaires. « lorsqu’un copropriétaire possède une quote-part des parties communes supérieure à la moitié, le nombre de voix dont il dispose est réduit à la somme des voix des autres copropriétaires ».
Ainsi, lorsqu’un copropriétaire détient plus de la moitié des voix de l’ensemble des copropriétaires, le nombre de celles-ci est ramené à la somme des voix de tous les autres copropriétaires.L’article 16 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967, pris pour l’application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, précise que « les majorités de voix exigées par les dispositions de la loi du 10 juillet 1965 pour le vote des décisions de l’assemblée générale et le nombre de voix prévu à l’article 8 (alinéa 1er) du présent décret sont calculés en tenant compte de la réduction résultant, s’il y a lieu, de l’application du deuxième alinéa de l’article 22 modifié de ladite loi ».
Le but de cette disposition d’ordre public est évidemment d’empêcher un copropriétaire d’une quote-part excédant la moitié de l’ensemble des quotes-parts de la copropriété d’emporter à lui seul une décision en assemblée générale.Si le syndic ne veille pas scrupuleusement à l’application de cette disposition, le risque est de voir les décisions adoptées frappées de nullité. Mais il arrive que la majorité se transforme en un instrument de blocage, lésant le ou les copropriétaire(s) minoritaire(s). Cependant ces derniers ne retrouvent pas démunies face à une décision abusive et dispose d’un recours juridictionnel.
L'abus de majorité est une notion essentiellement construite par la jurisprudence pour réprimer une situation de fait. Il s'agit de l'utilisation, par la majorité, de ses voix en assemblée générale, de manière à favoriser ses intérêts exclusifs au détriment de ceux des autres copropriétaires et de l'intérêt général (Cour d'appel de Paris, 14 mai 1966, Cour de Cassation, Cass. Civ. 3 11 janvier 1984).
En pratique, tout se déroule lors de l'assemblée générale de la copropriété, qu'elle soit annuelle ou extraordinaire.
On peut relever deux types de situations :
- Soit, la majorité porte des demandes à l'ordre du jour de l'assemblée, en sa faveur (autorisation de travaux, droits particuliers) qu'elle est certaine d'obtenir eu égard à son poids (Cour d'appel de Paris ; 26 mai 1995 : voir par exemple cette décision de financement par les fonds du syndicat des frais de restauration exposés par certains copropriétaires membres du conseil syndical, et ce sans aucun intérêt pour les autres).
- Soit la majorité refuse de voter ou s'oppose systématiquement à la réalisation de travaux nécessaires ou à des mesures essentielles pour la vie en copropriété, empêchant leur adoption (Cour d'appel de Paris, 10 décembre 1979 : affaire dans laquelle les travaux s'avéraient indispensables). Souvent, la décision prise du fait de l'abus conduit à une rupture d'égalité entre copropriétaires (Cass.Civ. 3, 11 mai 2006 : sur une décision de l'assemblée générale autorisant certains copropriétaires à occuper des emplacements de stationnement sans contrepartie pour les copropriétaires lésés).
Ont été jugées abusives :
Les décisions qui compromettent directement l’intérêt collectif comme :
- le refus d’autorisation de travaux indispensables (Paris, 10/12/79 : F. 1980. IR 273, obs. Giverdon ; Civ. 3è, 11/01/84 : RDI 1984. 450 ; Versailles, 16/09/85 : Rev. Loyers 1986. 40 ; Reims, 14/06/94 : JCP 1995. IV. 895) ;
- ou encore le refus de réparation des escaliers roulants dans un centre commercial dont le projet de rénovation ne se concrétisait pas 'Paris, 10 janv. 2008 : AJDI 2008. 217) ;
- ou encore la décision de l’assemblée de supprimer le préambule du règlement qui mettait à la charge du seul gestionnaire de l’immeuble le paiement des charges communes pendant la période d’affectation de cet immeuble à usage de résidence de tourisme.
Les décisions prisent visiblement pour favoriser certains copropriétaires ou qui, à tout le moins, créent une rupture d’égalité entre les copropriétaires, comme celles :
- tendant à couvrir les infractions à l’article 25 ayant consisté à réaliser des travaux non autorisés ou différents de ceux qui l’avaient été, caractérisant la poursuite d’un but étranger aux intérêts collectifs et la volonté de favoriser les intérêts d’un groupe minoritaire au détriment des autres copropriétaires mis devant le fait accompli.( Paris, 3 mars 2010, Loyers et copr. N°170, obs. Vigneron) ;
- de financer, avec les fonds du syndicat, des frais de restauration exposés par un nombre limité de copropriétaires, membres du conseil syndical, dans leur propre intérêt, sans contrepartie pour ceux exclus (Paris, 26 mai 1995 : IRC oct. 1996. 21, obs. Ritschy) ;
- de se désister d’une procédure contre deux copropriétaires votée sans complexe à la majorité par les deux copropriétaires présents à l’assemblée qui étaient concernés par cette procédure (Civ. 3è, 19/11/97 : RDI 1998. 139, obs. Capoulade) ;
- de céder un droit de surélévation des parties communes à titre gratuit ;
- de céder des parties communes privilégiant l’intérêt des copropriétaires acquéreurs au détriment de celui de la collectivité (Paris, 28/06/01 : Loyers et copr. 2001, n°294) ;
- de concéder à un copropriétaire un droit d’usage sur l’ancien local réservé aux deux roues et aux outils de jardinage, alors que ce local est une partie commune et qu’aucune décision préalable de désaffection des lieux n’a été prise ; -
- de choisir un système de sécurité privilégiant la sécurité d’une partie seulement des copropriétaires, sans certitude que ce système soit d’une efficacité supérieure à une autre solution qui aurait bénéficié au plus grand nombre ;
- prise par un copropriétaire qui profite de la majorité que lui donne ses tantièmes, ceux de son épouse et ceux de sa fille pour se faire autoriser à réaliser des travaux ou, dans des conditions équivalentes, pour se faire élire syndic afin d’échapper à une proposition de l’ancien syndic de le pour-suivre en justice pour défaut de paiement de ses charges20.
Ou, celles qui sont visiblement prises pour nuire à certains copropriétaires ou qui, à tout le moins, créent une rupture d’égalité entre les copropriétaires comme :
- l’opposition à l’installation d’un restaurant alors que la destination de l’immeuble permettait l’exploitation d’un tel commerce ;
- le refus d’autoriser l’aménagement et la trans-formation de greniers privatifs en divers lots à usage d’habitation, dans la mesure où ces travaux sont conformes à la destination des lots, de l’immeuble en général et conformes aux possibilités ouvertes par le règlement de copropriété à chacun des copropriétaires ;
- le refus d’octroyer des télécommandes d’accès supplémentaires au copropriétaire d’un cabinet médical ne comportant aucune entrée dans le hall et la résidence et dont l’entrée se fait soit par le parking, soit par un passage bénéficiant d’une servitude avec accès par porte vitrée ;
- le refus du retrait d’un bâtiment de la copropriété sans motif par rapport à l’intérêt de la copropriété ;
- le refus d’accorder à un copropriétaire le bénéfice d’équipements communs (boîtes aux lettres, interphone) ;
- la résolution ordonnant la suppression d’un rideau de canisses de protection installé pour la sécurité d’un jeune enfant, pour de douteuses considérations d’ordre esthétique ;
- le refus d’autoriser un copropriétaire à utiliser son lot à une fin commerciale alors qu’une précédente décision avait accordé à un autre copropriétaire d’un lot présentant les même caractéristiques situé au même niveau de l’immeuble, l’exercice d’une activité commerciale ;
- la décision qui limite à cinq copropriétaires sur onze le droit de stationner dans une cour commune (Paris, 24 avril 1984 : D. 1984. IR 383, obs. Giverdon) ;
- celle qui autorise certains copropriétaires à occuper des emplacements de stationnement sans contrepartie pour les copropriétaires lésés ;
- le refus d’autoriser la fermeture de balcons alors qu’une telle autorisation a été accordée à d’autres copropriétaires dans des circonstances identiques ;
- le fait de ne pas voter sur la question inscrite à la demande d’un copropriétaire et de ne pour-suivre que ce dernier en justice pour modifications illicites alors que d’autres copropriétaires étaient contrevenants ;
- le retrait sans motif légitime, du droit d’usage privatif d’une cour, partie commune, consenti à un copropriétaire par une précédente assemblée ;
- le refus de l’amélioration susceptible de rendre un lot habitable par la pose d’une fenêtre dans un lot dépourvu d’ouverture extérieure ;
- le refus à une demande visant à entériner une situation de fait existant depuis plus de quarante ans, même s’il s’agissait d’une violation au règle-ment de copropriété, dès lors que le changement d’affectation du lot ne pouvait plus être remis en cause sur une action du syndicat du fait de l’acquisition de la prescription décennale de l’article 42 alinéa 1er34.
Les décisions qui ne relèvent pas du pouvoir décisionnel de l’assemblée comme :
- celle de renoncer à des astreintes prévues à des actes de vente de copropriétaires déterminés en contrepartie de diverses obligations, que seules les parties à l’acte de vente (des copropriétaires individuels) pouvaient prendre (Aix en Provence, 4 avr. 2008 : Loyers et copr 2009, n°17, obs Vigneron) ;
- le vote de la remise en état et du remplacement éventuel des volets, qualifiés de parties privatives par l’assemblée qui outrepasse ses pouvoirs ;
- la décision ayant rendu obligatoire à tous les copropriétaires, le changement des garde-corps de balcons, déclarés parties privatives, avec mise en peinture, alors qu’il n’était nullement démontré que ces modifications étaient justifiées par la sécurité des occupants ;
- celle consistant à valider un mode de répartition égalitaire de l’indemnisation allouée en réparation non pas d’un préjudice collectif mais d’un ensemble de préjudices particuliers.
N’ont été jugées abusives
Les décisions considérées comme ayant été prises dans l’intérêt général comme :
- celle de recourir à un syndic professionnel prise dans une petite copropriété de trois lots ;
- le refus de réaliser des travaux d’accessibilité aux personnes handicapées faute d’intention de nuire ;
- l’appel de fonds exceptionnel voté en raison de la défaillance de copropriétaires ;
- la décision de créer un ascenseur dans un immeuble d’habitation de sept étages qui n’est pas contraire à la destination de l’immeuble, l’abus de majorité ne pouvant résulter ni du fait que l’avis de l’appelant n’a pas été suivi, ni du « laconisme du procès-verbal », ni de l’ordre d’examen des questions inscrites à l’ordre du jour ;
- la décision de l’assemblée de retenir l’entreprise dont le devis n’est pas le moins-disant ;
- le refus de l’assemblée d’installer des compteurs d’eau froide individuels ou d’autoriser la pose de tels compteurs dès lors que le règlement de copropriété ne comportait pas, au titre des charges, de clause particulière concernant les frais de consommation ;
- le vote de l’installation d’antenne de téléphonie mobile sur le toit-terrasse de l’immeuble en contrepartie d’un loyer.
Les décisions qui n’ont pas été considérées comme favorisant un copropriétaire aux dépens de l’intérêt collectif, comme :
- la résolution refusant de poursuivre en justice le copropriétaire qui occupe des parties communes, cette occupation apparaissant justifiée par les difficultés que rencontrent les copropriétaires pour se garer dans leurs emplacements de stationnement respectifs ;
- le vote négatif de deux copropriétaires entrainant le refus de la cession d’un couloir partie commune lorsque la diminution non négligeable de la surface de circulation d’un étage n’apparaît pas conforme à l’intérêt collectif du syndicat,
- la nomination d’un syndic filiale du groupe des copropriétaires majoritaires après examen des différences importantes dans la rémunération des candidats
Les décisions qui n’ont pas été considérées comme nuisant à un copropriétaire aux dépens de l’intérêt collectif, comme :
- le refus d’autoriser des travaux justifié par le défaut d’autorisation de l’activité envisagée ou justifié par les nuisances ainsi occasionnées aux autres occupants et l’atteinte portée à la destination de l’immeuble,
- le refus d’autoriser l’installation d’un ascenseur aux frais du copropriétaire demandeur car la faisabilité de l’installation ne permet pas, à elle seule, de démontrer l’abus de majorité, l’immeuble ne se prêtant pas, esthétiquement, à la création d’un ascenseur qui aurait engendré des inconvénients pour plusieurs occupants en place
.- le refus d’autoriser l’installation d’une gaine d’extraction des fumées en raison de son caractère inesthétique et de l’empiétement important sur les parties communes qui en serait résulté,
- le refus de la scission de la copropriété après de longues discussions et un vote explicité de manière particulièrement claire.
L’abus de droit s’apprécie au cas par cas en tout premier lieu au regard de l’intérêt collectif de la copropriété ,que la juridiction saisie doit donc rechercher avant de déterminer si la décision querellée le préserve ou pas.
- si l’intérêt collectif est préservé, l’abus de majorité sera écarté quand bien même les décisions prises engendreraient d’éventuels avantages ou inconvénients pour certains copropriétaires.
- si l’intérêt collectif est compromis en revanche, il en sera implicitement déduit que les décisionnaires ont agi dans le souci d’intérêts particuliers et, de facto, l’intention de nuire ou, à l’inverse, de favoriser un ou plusieurs copropriétaires au dé-triment des autres constituera l’élément complémentaire caractérisant l’abus de majorité.
La procédure de recours à suivre est simple : celle de la contestation d'assemblée générale. En tant que copropriétaire, il convient :
- d'attendre la réception du procès-verbal de l'assemblée générale litigieuse ;
- d'engager une action en abus de majorité devant le Tribunal de grande instance du lieu de situation de l'immeuble.
Une telle action doit nécessairement intervenir suivant un délai de deux mois à compter de la réception du procès verbal d'assemblée générale sous peine de forclusion(article 42 de la loi du 10 juillet 1965). L'intervention d'un avocat est nécessaire devant le Tribunal de grande instance.
L’annulation produira ses effets à l’égard de l’ensemble des copropriétaires. L'engagement d’une action en nullité n’a pas d’effet suspensif de la décision attaquée5t que celle-ci s’impose aux copropriétaires tant que sa nullité n’est pas prononcée par une décision définitive. L’annulation de la décision en-traine sa disparition rétroactive, tant à l’égard du copropriétaire demandeur à la nullité qu’à l’égard des autres membres de la copropriété et tous les copropriétaires peuvent se prévaloir de la nullité d’une décision prononcée à la requête de l’un ou plusieurs d’entre eux. Les pouvoirs du Juge se limitent à prononcer l’annulation demandée s’il l’estime fondée et qu’il ne peut pas substituer sa propre décision à celle qui a été annulée. Il ne peut pas notamment, ordonner les travaux dont l’assemblée générale a refusé l’exécution par une décision frappée de nullité sauf sur un autre fondement mais peut, une fois le refus d’autorisation des travaux annulé, tout de même faire droit à la demande de remise en état des lieux du syndicat quand ceux-ci ont été modifiés malgré le défaut d’accord de l’assemblée.
Une décision peut être annulée pour abus de majorité ou de minorité dans une copropriété ne comportant que deux copropriétaires.
Dans une copropriété comportant un certain nombre de lots répartis entre deux copropriétaires, le copropriétaire minoritaire souhaite rendre ces lots indépendants. L’assemblée générale rejette cette demande. Il assigne l’autre copropriétaire en annulation de cette décision.
La cour d’appel annule la décision pour abus de majorité. Elle retient que les travaux ayant fait l’objet de la résolution litigieuse sont indispensables pour rendre indépendants les lots des copropriétaires, qu’ils répondent à leur intérêt collectif et que la situation actuelle, qui n’est conforme ni à cet intérêt, ni au règlement de copropriété, profite exclusivement au copropriétaire majoritaire. Le pourvoi est rejeté. (Cass. 3e civ. 22-10-2020 n° 18-25.921 F-D)
La précision est nouvelle. La jurisprudence admet qu’une décision d’assemblée générale puisse être annulée pour abus de majorité s’il est établi qu’elle est contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires ou qu’elle a été prise dans le seul but de favoriser les intérêts personnels de certains copropriétaires au détriment des autres ou dans le but de leur nuire (Cass. 3e civ. 17-12-2014 n° 13-25.134 : Bull. civ. III n° 168 ; Cass. 3e civ. 5-11-2015 n° 14-23.493 ; Cass. 3e civ. 9-6-2016 n° 15-17.529). La jurisprudence admet également, quoique plus rarement, l’abus de minorité résultant de l’opposition systématique à une décision collective. Le droit des sociétés, qui connaît également cette notion, exige cumulativement la contrariété à l’intérêt général et la preuve de ce que l’opposant poursuivait le dessein de favoriser ses propres intérêts au détriment de l’ensemble des autres associés. En matière de copropriété, la jurisprudence est peu abondante, mais elle exige de la même façon, pour la caractérisation d’un abus de minorité, que soit établie la volonté d’un copropriétaire de favoriser ses propres intérêts au détriment de celui des autres (Cass. 3e civ. 19-9-2019 n° 18-18.800 : BPIM 6/19 inf. 418).
Doivent donc être annulées les décisions d'assemblée générale pour abus de majorité :
- mettant à la charge exclusive d'un copropriétaire des dépenses afférentes à des travaux effectués sur des parties communes (CA Paris, 23e ch., 28 sept. 1988 : JurisData n° 1988-025023. – CA Paris, 25 oct. 2007 : JurisData n° 2007-345397. – CA Paris, 8 sept. 2010 : JurisData n° 2010-020454) ;
- décidant des travaux d'étanchéité d'une terrasse dans l'intérêt de certains copropriétaires (CA Riom, 3 déc. 2012 : JurisData n° 2012-028808) ;
- constitue un abus de majorité le fait pour l'assemblée générale de refuser au copropriétaire d'un local commercial l'autorisation d'un raccordement d'eau sur des conduites communes alors qu'elle a précédemment consenti à d'autres propriétaires de boutiques la même possibilité de branchement (CA Paris, 23e ch., 30 nov. 1990 : Loyerset copr. 1991, comm. 94. – Dans le même sens : CA Paris, 27 avr. 1990 : Loyers et copr. 1990, comm. 326. – CA Paris, 28 mars 1997 : JurisData n° 1997-020556. – CA Paris, 24 oct. 1997 : JurisData n° 1997-730050).
- le refus opposé par les copropriétaires aux travaux de raccordement de l'installation sanitaire sur le réseau d'assainissement de l'immeuble (travaux affectant les parties communes) non motivé par l'intérêt de la copropriété constitue un abus demajorité, qui justifie la nullité de la décision d'assemblée générale. Dans la mesure où le raccordement des installations sanitaires au réseau commun peut être tenu pour une amélioration, le juge peut autoriser le copropriétaire à effectuer les travaux (CA Paris, 23e ch., 20 nov. 1992 : JurisData n° 1992-023808).
- la volonté de couvrir les infractions commises à l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965 consistant à réaliser des travaux non autorisés ou des travaux différents de ceux qui ont été autorisés caractérise la poursuite d'un but étranger aux intérêts collectifs, à savoir favoriser les intérêts d'un groupe majoritaire au détriment des autres copropriétaires mis devant le fait accompli. Est donc indéniable l'abus de majorité commis par l'assemblée générale. (CA Paris, 4e pôle, 2e ch., 3 mars 2010, SCI 12 rue Alphonse Yvon c/ Bellon : JurisData n° 2010-002361
Les abus de majorités sont souvent remarqués dans les décisions qui concernent l’exécution de travaux dans l’immeuble , ou de travaux qui concernent un copropriétaire. Il appartient aux copropriétaires minoritaires de rapporter la preuve de l'abus commis. Le critère de l’abus de majorité est la recherche de l’intérêt commun et le fait qu’un copropriétaire soit lésé est indifférent.
Avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 30 octobre 2019, aucune disposition spécifique ne régissait de de copropriété à deux. Ce qui n’était pas sans poser des difficultés compte tenu des risques de blocage inhérents à l’application de l’article 22, al. 2 de la loi 65-557 du 10 juillet 1965, selon lequel lorsqu’un copropriétaire possède une quote-part des parties communes supérieure à la moitié, le nombre de voix dont il dispose est réduit à la somme des voix des autres copropriétaires. Cette disposition a pour objectif d’éviter l’hégémonie d’un seul copropriétaire mais peut conduire à un blocage récurrent, notamment dans les petites copropriétés et encore plus dans les copropriétés à deux où, en raison des dispositions de l’article 22, al. 2 précité, aucun copropriétaire n’est majoritaire ou minoritaire, puisque à parité exacte pour la prise de décision. Cela n’exclut pas pour autant la caractérisation d’un abus, ainsi que le retient en l’espèce la Cour de cassation. Il s’agit d’ailleurs plutôt d’un abus de minorité puisque chaque copropriétaire ne peut, compte tenu de la règle de réduction des voix, imposer une décision, mais seulement bloquer son adoption. La Cour de cassation retient que la cour d’appel a caractérisé cet abus, en considérant que la décision était contraire à l’intérêt collectif qui était de rendre les lots indépendants et profitait exclusivement au copropriétaire qui s’était opposé à la décision, qui pouvait jouir du hall d’entrée et avait seul la maîtrise de la production d’eau chaude, au détriment de l’autre. Elle approuve donc la cour d’appel d’avoir annulé la décision.
Sources : L’abus de majorité en copropriété (azoulay-avocats.com)
Il peut y avoir abus de majorité ou de minorité même dans une copropriété à deux < Copropriété < Immobilier - Éditions Francis Lefebvre (efl.fr)
L’abus de majorité et égalité des voix - Légavox (legavox.fr)
Abus de majorité et copropriété - Légavox (legavox.fr)
Copropriété : que faire en cas d’abus de majorité ? (avocats-picovschi.com)
Le 26 novembre 2020
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