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La cession du fonds de commerce


La cession du fonds de commerce doit respecter des règles de fonds, et de forme. De plus, l’acheteur et l’acquéreur doivent respecter toute une série d’obligations en passant de l’obligation du paiement du prix à la garantie d’éviction.


 

 

 

Le fonds de commerce peut être défini comme étant un ensemble de biens mobiliers, corporels et incorporels qu’un commerçant personne physique ou morale affecte à une activité commerciale. Le fonds comprend notamment le mobilier commercial, le matériel, l’outillage, la marchandise... on parle ici des éléments corporels composant le fonds de commerce. Mais le fonds de commerce ne se résume pas aux seuls éléments mobiliers, puisque l’enseigne, le nom commercial, la clientèle, les droits de propriété industrielle, littéraire et artistique font partis du fonds de commerce en tant qu’éléments incorporels.

 

 

I. Les conditions de fonds et les conditions de forme de la vente du fonds de commerce

A. Les conditions de fond de la vente du du fonds de commerce

 

1. La capacité


La vente d’un fonds de commerce est un acte de commerce pour le cédant comme pour l’acheteur, il serait même en principe nécessaire que l’acquéreur dispose de la qualité de commerçant lorsque celui-ci souhaite exploiter lui même le fonds de commerce.
Le mineur non émancipé ne peut pas exercer l’activité  de commerçant, ni même réaliser des actes de commerce, il sera alors dans l’impossibilité d’acquérir un fonds de commerce. Mais, il aura cependant la possibilité de le vendre, notamment avec l’autorité de ses deux parents sous le régime de l’administration légale simple, et via l’administrateur des biens du mineur avec une autorisation des juges des tutelles sous le régime de l’administration légale sous contrôle judiciaire. Le mineur émancipé, peut quant à lui passer tous les actes de la vie civile, mais les actes de commerce exercés à titre habituels lui sont cependant interdits, il pourra alors avoir la possibilité de vendre ou d’acheter le fonds de commerce, mais ne pourra pas pour autant exercer l’activité de commerçant, c’est alors le régime de la location-gérance qui aura tendance à s’appliquer.
Concernant ensuite le majeur sous tutelle, le tuteur pourra vendre le fonds de commerce mais avec l’autorisation du conseil de famille ou à défaut avec l’accord du juge des tutelles. Le majeur en curatelle quant à lui ne peut pas céder seul son fonds de commerce, il devra recourir à  l’aide de son curateur, alors que le majeur sous sauvegarde de justice pourra librement céder ou acquérir seul un fonds de commerce.

2. Le consentement

Lors de la vente du fonds de commerce, les parties doivent être consentantes, car le seul consentement opère le transfert du fonds. Pour qu’il y ait consentement,il est nécessaire que le vendeur et l’acheteur se soient accordés sur la chose et sur le prix ; c’est alors une condition soumise à l’appréciation souveraine des juges du fond.
Une fois le consentement présent, il faut encore s’assurer que celui-ci respecte les exigences de l’article 1109 du Code civil, c'est-à-dire qu’il ne soit pas vicié par l’erreur, le dol ou encore la violence.

  • L’erreur

 Concernant tout d’abord l’erreur (article 1110 du Code civil), il y en a de plusieurs types, en effet il existe l’erreur sur la substance, sur la personne ou encore sur la valeur.

L’erreur sur la substance entraine selon le droit commun la nullité, la cour de cassation considère qu’il y a erreur sur la substance de la chose lorsque sans elle les parties n’auraient pas contractées. Ainsi, si lors de la vente du fonds de commerce, une partie commet une erreur substantielle, sur un élément essentiel du fond alors la nullité de la cession pourra être prononcée.
L’erreur sur la personne peut elle aussi être une cause de la nullité de la vente, lorsque la considération de la personne a été une des causes principales de la vente. L’erreur sur la personne recoupe aussi
bien l’erreur sur l’identité physique mais aussi de l’identité civile, ou encore de la qualité substantielle de la personne. Mais concernant la vente du fonds de commerce, qui n’est pas conclu intuitu personae l’erreur sur la personne reste rarement invoquée, mais elle reste tout à fait envisageable.
Enfin l’erreur sur la valeur n’est pas admise.

  • La violence

La vente du fonds de commerce est soumise à l’article 1112 du Code civil qui énonce « Il y a violence lorsqu'elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et qu'elle peut lui inspirer la crainte d'exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent. On a égard, en cette matière, à l'âge, au sexe et à la condition des personnes ». Ainsi, il sera possible lorsqu’une partie a extorqué le consentement de la partie cocontractante d’invoquer la nullité de la vente.

  • Le dol

Le dol est défini à l’article 1116 du Code civil qui énonce « Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté ». Le dol peut alors être défini comme une ruse ou une tromperie afin de dissimuler la vérité dans le but d’induire le contractant en erreur et le déterminer à contracter.
La caractérisation du dol est soumise à l’appréciation souveraine des juges du fond, mais une fois celui-ci caractérisé la vente pourra être annulée. Plusieurs types de dols existent : le dol simple, la réticence dolosive peut parfois suffire pour prononcer la nullité il s’agira alors de garder sous silence un fait, qui si le cocontractant l’avait connu n’aurait pas contracté. Il faut encore souligner que la cour de cassation admet que les juges du fond prennent en compte la qualité de professionnel de l’acquéreur, afin d’en conclure que le silence du vendeur n’est pas constitutif d’un dol.

L'acquéreur d'un fonds de commerce de restaurant, qui a pris en location les locaux d'exploitation appartenant au vendeur, demande l’annulation de la cession du fonds et du bail commercial pour dol du vendeur.

Il est fait droit à sa demande. Une clause du règlement de copropriété de l’immeuble au sein duquel se situait le fonds vendu excluait les commerces de nature à gêner les autres copropriétaires par le bruit ou par les odeurs et précisait que les locataires devaient s’engager à se conformer à toutes les dispositions du règlement de copropriété et du règlement intérieur, à peine de résiliation des baux. En outre, une assemblée générale des copropriétaires avait admis l’exercice de l’activité de restauration dans les locaux, sous réserve qu’elle se limite à la dégustation de plats cuisinés prêts à emporter et qu’il n’y ait pas de réception de clientèle après 20 heures. Le propriétaire initial du fonds s’était conformé à ces restrictions et n’avait pas ouvert le restaurant le soir.

Le vendeur, propriétaire des locaux, connaissait le contenu du règlement de copropriété ainsi que les termes de la décision de l’assemblée générale des copropriétaires, qui lui avait été communiquée lors de l’acquisition du fonds, et il ne démontrait pas avoir porté à la connaissance de l’acquéreur que le fonds cédé ne pouvait être exploité qu’à certaines conditions, alors que l’obligation légale de loyauté contractuelle lui imposait d'informer l'acquéreur sur la décision de l’assemblée générale, qui avait une incidence directe sur les conditions d’exploitation du fonds, comme l’avait fait à son égard le précédent propriétaire (Cass. com. 6-1-2021 n° 18-25.098 F-D ).

Le défaut d’information par le propriétaire des locaux ou le vendeur du fonds de commerce sur les conditions d’exploitation des locaux dans lesquels le fonds est exploité a déjà été qualifié de réticence dolosive. Ainsi, commet un dol le vendeur d’un fonds de commerce de bar-restaurant qui cache l’illicéité d’une terrasse installée sur le domaine public, alors que l'impossibilité de servir sur la terrasse était de nature à réduire fortement la rentabilité du fonds de commerce (Cass. com. 19-2-2008 n° 06-11.014 F-D : RJDA 7/08 n° 780) ou qui se tait sur la superficie de la terrasse légalement exploitable (Cass. com. 13-11-2013 n° 12-18.016 : RJDA 3/14 n° 208). Commet de même un dol le bailleur qui omet d’informer le locataire de la décision administrative interdisant l’exploitation d’un commerce alimentaire, alors que le bail était conclu pour un commerce exclusivement alimentaire (CA Rennes 9-9-2020 n° 17/03847 : BRDA 21/20 n° 19).  

La notion de réticence dolosive peut être liée à celle de loyauté contractuelle (notamment, CA Paris 6-5-2014 n° 12-19322 : RJDA 11/14 n° 842).

En l'espèce, le vendeur du fonds était propriétaire des locaux d'exploitation et c'est en cette dernière qualité que les juges ont relevé qu'il ne pouvait pas ignorer les dispositions du règlement de copropriété restreignant l'usage des locaux. La solution aurait, à notre avis, été identique s'il n'avait été qu'exploitant du fonds vendu, dans la mesure où sa connaissance du règlement de copropriété résultait de la circonstance qu'il l'avait respecté en tant qu'exploitant. 

 

3. Le prix

Le prix est librement fixé par les parties, mais celui-ci ne doit pas être dérisoire ni vil, car cela équivaut en réalité à une absence de prix. Or, en l’absence de prix, la vente perd un élément essentiel, celle-ci encours alors la nullité. Cependant la vente pour le prix symbolique est tout à fait possible lorsque le passif du fonds de commerce est très important.
Il est encore nécessaire que le prix soit réel et sincère, le fait de dissimuler une partie du prix est réprimé : la contre lettre qui elle prévoit le prix réel est frappée de nullité, s’ajoute à cela une sanction pénale et fiscale. En plus des conditions de fonds, la vente du fonds de commerce est soumise à des conditions de forme.



B. Les conditions de forme de la vente du fonds de commerce

 

1. L'écrit

L’écrit n’est pas une condition de validité de la vente, même si aujourd’hui une vente de fonds de commerce sans écrit reste exceptionnelle. De plus, la preuve de la vente par l’écrit n’est pas obligatoire, la preuve peut s’établir par tous moyens. Selon le même article L141-1 du Code de commerce certaines mentions doivent obligatoirement être incluses dans l’acte de vente, cette obligation permet alors de prémunir l’acheteur contre les fraudes. Il faut alors préciser que ces mentions sont d’ordre public. 

La loi du 19 juillet 2019  l’article L. 141-1 du code de commerce issu de la loi du 29 juin 1935 relative au règlement du prix de vente des fonds de commerce, qui impose des  énonciations obligatoires dans l’acte de vente d’un fonds de commerce.

 

2. Les mentions requises

 

Les mentions requises dans l’acte de vente, sont diverses. Tout d’abord, le nom du précédent vendeur doit y figurer, la loi exige seulement le nom du précédent vendeur. L’article du code de commerce exige encore la date à la quelle le vendeur a acquis le fonds de commerce ainsi que la nature de l’acte qui a permis cette acquisition  (acte sous seing privé ou acte authentique), le prix auquel le vendeur a acquis le bien doit lui aussi figurer dans l’acte. Lorsque c’est le vendeur qui a créer lui même le fonds de commerce, ces mentions ne sont bien évidemment pas exigées, il devra simplement l’indiquer dans l’acte de vente.
L’acte doit encore fait état des privilèges et nantissements qui grèvent le fonds de commerce (cela est fournit par le greffier du tribunal de commerce qui tient les inscriptions).
Le vendeur doit encore préciser dans l’acte de vente « Le chiffre d'affaires qu'il a réalisé durant les trois exercices comptables précédant celui de la vente, ce nombre étant réduit à la durée de la possession du fonds si elle a été inférieure à trois ans », ainsi que les résultats d’exploitations concernant la même durée.
Enfin, l’acte doit mentionner « Le bail, sa date, sa durée, le nom et l'adresse du bailleur et du cédant, s'il y a lieu ». En effet, il est important pour l’acheteur de savoir si le fonds de commerce est soumis à un contrat de bail ou non. Grâce à la date, et la durée du bail figurant sur l’acte, l’acheteur pourra se faire une idée de la valeur du fonds qu’il achète.

 

3. Sanction du non-respect des conditions

 

Ces conditions ont été mises en place afin de protéger l’acheteur, c’est pourquoi l’omission d’une de ces conditions de forme pourra conduire selon l’article L414-1 du Code de commerce à la nullité de la vente. Cependant, il s’agit d’une nullité relative, c'est-à-dire que seul l’acheteur pourra s’en prévaloir et cela dans un délai relativement court, puisqu’il lui faudra agir dans l’année suivant la signature de l’acte de cession du fonds de commerce.
De plus, la nullité n’est pas obligatoire, en effet l’article précise que cette omission peut conduire à la nullité. C’est alors les juges qui devront apprécier si l’absence de cette condition a pu vicier le consentement de l’acquéreur.

 

 

II. Les obligations des parties

 

Le vendeur du fonds de commerce devra observer certaines obligations (A), tout comme l’acquéreur du fonds (B).



A. Les obligations du vendeur du fonds de commerce

L’obligation de délivrance consiste pour le vendeur de mettre à disposition de l’acquéreur tous les éléments corporels et incorporels du fonds de commerce, comme par exemple l’enseigne ou le nom commercial. Mais, il est nécessaire que cette obligation soit correctement exécutée par le vendeur, c’est pourquoi le fonds de commerce doit « présenter les qualités et caractéristiques que l’acquéreur est en droit  d’attendre ». Dans un arrêt de la chambre commerciale du 21 janvier 1992 la Cour de cassation a estimé que le vendeur avait manqué à son obligation de délivrance, en délivrant un fonds de commerce d’hôtellerie sans installation électrique conforme aux normes de sécurité .
Les articles 1606 et 1607 du Code civil régissent l’obligation de délivrance du vendeur. Concernant les éléments mobiliers, c’est l’article 1606 du Code civil qui aura vocation à s’appliquer, en effet celui-ci énonce que « La délivrance des effets mobiliers s'opère : ou par la remise de la chose, ou par la remise des clefs des bâtiments qui les contiennent, ou même par le seul consentement des parties, si le transport ne peut pas s'en faire au moment de la vente, ou si l'acheteur les avait déjà en son pouvoir à un autre titre ».
Donc, les éléments corporels pourront être délivrés de plusieurs façons. Concernant ensuite les éléments incorporels, c’est l’article 1607 du code civil qui devra s’appliquer, celui-ci énonce que « La tradition des droits incorporels se fait, ou par la remise des titres, ou par l'usage que l'acquéreur en fait du consentement du vendeur ».
Le non respect de l’obligation de délivrance par le vendeur, entraine pour lui des sanctions. C’est la date d’entrée en possession qui constitue le point de départ des actions de l’acheteur pour un défaut dans l’obligation de délivrance.
L’article 1610 du Code civil énonce que si le vendeur manque à son obligation de délivrance, l’acquéreur pourra soit demander la résolution de la vente soit sa mise en possession si le retard ne vient que du fait du vendeur. Ainsi deux actions sont ouvertes à l’acquéreur. En ce qui concerne la mise en possession, celle-ci consiste pour l’acquéreur à demander la délivrance forcée du fonds. De plus, l’article 1611 du Code civil rappelle que de toute manière le vendeur doit être condamné à des dommages et intérêts, si l’acquéreur a subit un préjudice du fait du défaut de délivrance.Deux types de garanties doivent être respectés par le vendeur : la garantie des vices cachés, et la garantie d’éviction.
Concernant tout d’abord la garantie des vices cachés, celle-ci est régie par l’article 1641 du code civil, celui-ci énonce « Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminue tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus ».
Il faut noter que pour éviter cette garantie le vendeur devra renseigner de manière précise l’acquéreur, car en portant à la connaissance de l’acquéreur le défaut, celui-ci ne pourra alors plus faire l’objet d’une action, car le vice n’est par définition plus caché.
Cependant, il faut prendre en compte la qualité de l’acquéreur, en effet, les juges seront plus sévères à l’ égard d’un acquéreur professionnel, et notamment lorsqu’ils exercent dans la même spécialité.
Dans ce cas il ne pourra pas être reproché (sur certains points) au vendeur le manque d’informations, car l’acquéreur aurait pu de lui même trouver aisément ces informations.
C’est l’article 1642 du code civil qui va s’appliquer ici ; « le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même », c’est pourquoi en présence d’un professionnel
acquéreur, une présomption simple de connaissance a été posée par la jurisprudence.
L’acquéreur du fonds qui souhaite se prévaloir de la garantie des vices cachés à une option entre l’action rédhibitoire et l’action estimatoire selon l’article 1644 du code civil qui énonce que «Dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix, telle qu'elle sera arbitrée par experts. » .
L’action rédhibitoire permet à l’acquéreur de se faire restituer le prix en rendant le fonds de commerce, alors que l’action estimatoire, elle, permet à l’acquéreur d’obtenir une diminution du prix après une expertise de la valeur du fonds.

La garantie d’éviction quant à elle recouvre deux aspects, on parle alors de garantie du fait personnel et de garantie du fait du tiers. Celle-ci est prévu par l’article 1626 du code civil qui prévoit que « Quoique lors de la vente il n'ait été fait aucune stipulation sur la garantie, le vendeur est obligé de droit à garantir l'acquéreur de l'éviction qu'il souffre dans la totalité ou partie de l'objet vendu, ou des charges prétendues sur cet objet, et non déclarées lors de la vente».
Ainsi, le vendeur ne pourra pas invoquer un droit sur le fonds de commerce qu’il a transmis, cette garantie empêche aussi le vendeur de porter atteinte à la jouissance du bien par l’acheteur, la chambre des requêtes dans un arrêt du 29 juillet 1908 a estimé que le vendeur d’un fonds de commerce doit s’abstenir de tout acte de nature à détourner la clientèle du fonds cédé.
La garantie d’éviction concerne aussi la garantie du fait du tiers.
L’éviction pourra être totale c'est-à-dire qu’un tiers revendique la propriété du fonds de commerce, ou partielle lorsque le tiers ne revendique qu’une partie des droits. Plusieurs conditions doivent être remplies afin que la garantie du fait du tiers puisse jouer ; il faut que le droit du tiers soit antérieur à la vente, que le trouble ne soit pas imputable à l’acheteur, le tiers doit avoir engagé une action en justice (ou l’acheteur), et l’acquéreur doit être de bonne foi.
Cependant, le vendeur n’est pas tenu de restituer le prix lorsque l’acquéreur avait connaissance lors de la vente du danger de l’éviction ou lorsqu’il a acheté le fonds à ses risques et périls.
En cas d’éviction totale, l’acquéreur pourra demander au vendeur la restitution du prix comme l’énonce l’article 1630 du Code civil « Lorsque la garantie a été promise, ou qu'il n'a rien été stipulé à ce sujet, si l'acquéreur est évincé, il a droit de demander contre le vendeur :

 

1° La restitution du prix,

2° Celle des fruits, lorsqu'il est obligé de les rendre au propriétaire qui l'évince ; 

3° Les frais faits sur la demande en garantie de l'acheteur, et ceux faits par le demandeur originaire ; 

4° Enfin les dommages et intérêts, ainsi que les frais et loyaux coûts du contrat.

 Concernant ensuite l’éviction partielle, l’acquéreur pourra demander la résolution de la vente ou alors la valeur de la partie dont il a été évincé.

 

B. Les obligations de l’acheteur

L’acheteur a lui aussi certaines obligations à respecter, notamment l’obligation de recevoir la livraison du fonds de commerce. L’acquéreur doit encore veiller à ne pas oublier de publier la vente sous quinze jours. Mais il doit principalement payer le prix, l’article 1650 du code civil précise d’ailleurs que « la principale obligation de l'acheteur est de payer le prix au jour et au lieu réglés par la vente ». En effet, le prix est l’obligation essentielle de l’acquéreur.
De plus selon l’article 1593 du Code civil « les frais d'actes et autres accessoires à la vente sont à la charge de l'acheteur », ainsi l’acheteur à la charge des frais annexes de la vente du fonds de commerce. C’est pourquoi les droits de timbre et d’enregistrement, les frais de publications légales, les frais d’inscription du privilège du vendeur, les frais éventuels d’expertises, ... seront supportés par l’acquéreur.
Cependant, dans certains cas l’acheteur ne pourra pas payer le prix du fonds au vendeur, notamment en présence de créancier du vendeur, qui lorsqu’ils ont connaissance de la vente par le biais de la publicité, auront la possibilité de former opposition au paiement du prix. Cette opposition empêche l’acheteur de payer le prix du fonds de commerce au vendeur, il devra soit attendre que l’acte soit levé, que le prix soit réparti entre les créanciers, ou alors que le prix soit versé à la caisse des dépôts et des consignations.

Si l’acquéreur refuse de payer le prix, le vendeur pourra alors mettre en œuvre l’action résolutoire, afin d’exiger la résolution de la vente comme le prévoit les articles 1184 et 1654 du Code civil. En effet, l’article 1184 du Code civil énonce que « La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.
Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances ». L’article 1654 du code civil prévoit quant à lui que « Si l'acheteur ne paye pas le prix, le vendeur peut demander la résolution de la vente ».
Pour demander la résolution de la vente, il faut tout d’abord que le prix n’ait pas été payé par l’acquéreur, mais le non paiement du prix est compris de manière relativement large par les tribunaux, car le non paiement d’une partie du prix permet quand même d’engager l’action en résolution. Cependant comme le prévoit l’article 1184 du Code civil les tribunaux peuvent accorder des délais de paiement à l’acquéreur, avant de prononcer la résolution de la vente du fonds de commerce.
Cependant selon l’article L141-6 du Code de commerce « L'action résolutoire, établie par l'article 1654 du Code civil, doit, pour produire effet, être mentionnée et réservée expressément dans l'inscription », ainsi pour que l’action résolutoire puisse produire ses effets, il faut que celle-ci soit mentionnée et réservée dans l’inscription du privilège du vendeur. Et même, si une clause dans le contrat de vente prévoit la résolution de plein droit de la vente en cas de non payement du prix, cela ne dispense pas le vendeur d’établir cette inscription. L’absence d’une telle inscription entraine pour le vendeur, vis-à-vis des tiers, la perte du bénéfice de l’action en résolution. Ainsi les créanciers inscrits pourront opposer le bénéfice de l’action en résolution du vendeur pour le défaut de publicité.
La résolution du contrat aura naturellement pour effet d’annuler la vente, ainsi le vendeur récupèrera en nature le fonds de commerce, et annulera aussi les droits que le tiers auraient pu avoir sur le bien. Le jugement qui prononce la résolution de la vente, prononce l’anéantissement rétroactif de la vente, il s’agit alors de remettre les parties dans le même état où elles se trouvaient avant la vente du fonds. C’est ainsi que, la résolution de la vente va permettre d’annuler le bail qui aurait pu être contracté sur le fonds.
Cependant, la question concernant la restitution des éléments nouveaux qui ont pu être apportés au fonds de commerce n’est pas encore clairement résolue, certains penchant pour une application littérale de l’article L146-1 du code de commerce qui énonce que « L'action résolutoire, établie par l'article 1654 du code civil, doit, pour produire effet, être mentionnée et réservée expressément dans l'inscription. Elle ne peut être exercée au préjudice des tiers après l'extinction du privilège.
Elle est limitée, comme le privilège, aux seuls éléments qui ont fait partie de la vente », ainsi la résolution serait limitée aux seuls éléments qui ont fait partie de la vente, et donc les nouveaux éléments apportés au fonds ne pourront pas faire partie de la restitution accordée au vendeur, mais cette position aboutie à un démembrement du fonds de commerce, et à une situation qui n’est pas confortable.
Il faut encore souligner que le vendeur pourra exiger des dommages et intérêts lorsque le fonds aura perdu de sa valeur, de même il pourra demander la réparation de son préjudice du fait de la résolution de la vente à l’acquéreur.

 

III. Le droit d'information des salariés

 

La Loi Hamon n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire a instauré l’obligation pour le cédant d’un fonds de commerce d’en informer ses salariés, mécanisme codifié au sein des articles L.141-23 et suivants du Code de Commerce.

L’objectif poursuivi par le législateur fut d’encourager les salariés à la reprise de leur entreprise en vue d’assurer la survie de cette dernière. Il ne s’agit pas d’un droit de préemption ou de priorité accordé aux salariés mais un simple droit d’être informé de la volonté de leur employeur de céder son fonds.

Le gouvernement a élaboré un « guide pratique à destination des salariés et des chefs d’entreprises » mis en ligne sur le site du ministère de l’Économie. Ce guide a pour ambition de simplifier le quotidien des entreprises qui envisagent d’entrer dans un processus de vente. Il n’a pas de valeur normative mais constitue un outil au service des praticiens lors du traitement de dossiers de cession de fonds de commerce.

Cette obligation s’impose aux entreprises n’ayant pas l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise et aux entreprises ayant l’obligation de mettre en place un tel comité comprenant entre 50 et 250 salariés réalisant un chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 50 millions d’euros. L’obligation d’information des salariés s’impose d’une part en cas de cession d’un fonds de commerce, et d’autre part en cas de cession d’une participation majoritaire dans une société. Elle concerne tous les salariés, y compris les salariés en arrêt maladie ou en congé maternité ainsi que les apprentis, mais non les intérimaires ni les stagiaires, et ne s’applique pas en cas de cession à un conjoint, un ascendant ou un descendant.
L’information intervient dès que le propriétaire à l’intention de vendre. Les salariés pourraient reprocher à l’exploitant son manque de diligence en cas d’information tardive. En pratique l’information doit donc être délivrée avant la signature même d’un avant-contrat de vente.

La cession ne peut intervenir que deux mois après que tous les salariés aient reçu l’information. Une fois que la formalité d’information a été accomplie par le cédant, ce dernier dispose d’un délai de deux ans et deux mois pour réaliser la cession. En pratique la cession peut toutefois être réalisée avant l’expiration du délai de deux mois si tous les salariés ont fait savoir qu’ils renonçaient à présenter une offre de rachat de façon explicite et non équivoque. Dans les entreprises soumises à l’obligation de créer un comité d’entreprise la loi ne prévoit pas de délai spécifique car elle s’appuie sur la procédure de consultation obligatoire du comité d’entreprise.

L’obligation d’information des salariés ne porte que sur d’une part la volonté du cédant de procéder à une cession et d’autre part le fait que les salariés aient la possibilité de présenter une offre d’achat. La loi n’impose aucune communication d’autre information et d’autre document relatif à la comptabilité ou au fonctionnement de l’entreprise au cédant qui ne souhaite pas entrer en négociation. En pratique il est préconisé de mentionner également la possibilité pour le salarié de se faire assister par la personne de son choix et de l’obligation qui lui incombe d’en informer l’employeur dans les meilleurs délais.
Le décret n° 2014-1254 du 28 octobre 2014 sur les modalités de l’obligation d’information propose une liste non exhaustive des modalités d’exécution de l’information. L’information des salariés peut ainsi être exercée selon l’une ou plusieurs des modalités suivantes :

• au cours d’une réunion d’information des salariés à l’issue de laquelle ces derniers signent le registre de présence à cette réunion,
• par un affichage,
• par courrier électronique, à la condition que la date de réception puisse être certifiée,
• par remise en mains propres,
• par lettre recommandée avec demande d’avis de réception,
• par acte extrajudiciaire.

Toute offre d’achat présentée par un salarié doit être adressée au propriétaire cédant sans délai. Celui-ci est totalement libre de choisir s’il souhaite ou non entrer en négociation avec un ou plusieurs salariés. Le refus du vendeur d’étudier ou d’accepter une offre n’a pas à être motivé. Il peut ne pas répondre s’il le souhaite. Dans sa version initiale issue de la loi Hamon, le dispositif prévoyait que le non-respect de l’obligation d’information ouvrait aux salariés la possibilité d’agir en nullité contre la cession. Il s’agissait d’une nullité relative et facultative. Le juge n’était pas obligé de déclarer la cession nulle. La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 « Macron » a remplacé la nullité de la cession par l’instauration d’une amende civile. Cette amende s’applique dans tous les cas où l’obligation d’informer les salariés s’impose. Les textes prévoient désormais que la juridiction saisie peut, à la demande du ministère public, prononcer une amende civile dont le montant ne peut excéder 2 % du montant de la vente.

 

Sources : Vente d’un fonds de commerce : délais, formalités, frais (legalstart.fr)

La cession de fonds de commerce (legalstart.fr)

LE DROIT D’INFORMATION DES SALARIÉS LORS DE LA CESSION DU FONDS DE COMMERCE | Chambre Gironde Notaires (chambre-gironde.notaires.fr)

Le vendeur d'un fonds de commerce doit informer l'acheteur des restrictions du règlement de copropriété < Conclusion < Affaires - Éditions Francis Lefebvre (efl.fr)

 

Le 1er juillet 2019 dernière mise a jour le 12 mars 2021

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